Traitement contre l’hépatite C : accessible à qui ?
L’apparition du Sovaldi, nouveau traitement médicamenteux contre l’hépatite C a suscité les débats politiques en France. Alors qu’on pensait que le souci de l’accessibilité à ce médicament n’a pas lieu d’être dans les pays développés, ce n’est vraisemblablement pas le cas, car l’Etat français se demande aujourd’hui s’il est en mesure d’offrir ce nouveau traitement à tout patient qui en a besoin.
Le prix d’une boîte de ce nouveau médicament créé par Gilead, un laboratoire aux USA, s’élève à 18500 euros, alors qu’un traitement dure 12 semaines, ce qui fait au total 56000 euros. Etant donné ce coût élevé, l’Etat français ne peut pas se permettre de distribuer ce médicament à tous les patients.
L’Etat a fait le point et a conclu que le médicament ne pourra même pas être remboursé pour les patients les plus gravement atteints, car cela nécessiterait un budget de plus d’un milliard d’euros. Pourtant la sécurité sociale a prévu de réduire ses dépenses en médicaments, suite à la présentation du budget le lundi 29 septembre.
Pour que le prix de Sovaldi soit plus accessible, l’Etat a décidé d’utiliser la manière forte : pour toutes les ventes de médicaments destinés à guérir de l’hépatite C, il prélèvera une taxe dès que le montant excède 450 millions en 2014 et 700 millions en 2015.
Le nombre de patients atteints d’hépatite C frôlerait les 200 000
Jusqu’alors, les laboratoires ont revendiqué des prix conséquents et ont la réponse leur était favorable. L’Etat français n’a jamais fait d’histoire lorsqu’il s’agissait d’investir des milliers d’euros chaque année et pour chaque patient dans le traitement de certaines maladies, comme les cancers rarissimes ou les maladies orphelines. Si auparavant, il était question de 2000 patients, ce nombre a en réalité été multiplié par 100. Ainsi, de nos jours, ce sont quelques 200000 patients qui sont concernés par l’hépatite C. Chaque année, près de 5000 nouveaux cas sont recensés. Mais le problème ne se pose pas qu’en France. Au mois de juin dernier, 15 pays d’Europe se sont constitué en un bloc pour revendiquer aux laboratoires la baisse des prix, argumentant qu’il s’agissait d’une question de santé publique. Cette revendication a entrainé l’obligation des Etats à parler d’une seule et même voix, quand bien même les politiques de santé sont différentes, afin de faire le poids devant les requêtes des laboratoires.
Mais la polémique illustrée par le cas du médicament Sovaldi n’est qu’un exemple. Dans le traitement du cancer, les solutions de traitement ont beaucoup évolué mais s’accompagnent d’une flambée des prix. Pour une première thérapie, l’Etat doit au moins débourser 100000 euros. C’est pour cela que le profil de patient qui bénéficie de remboursement est très spécifique. Mais si l’on va dans ce sens, on se demande comment la situation va évoluer dans le temps. Il y a aussi la problématique des médicaments courants : des milliers de traitements sont prescrits chaque année et la marque vaut pourtant très cher, bien qu’il existe des médicaments moins coûteux mais tout aussi efficaces.
L’Etat continue de peaufiner sa stratégie pour s’opposer aux spéculations chez les laboratoires en orientant peu à peu les prescriptions du côté des médecins. Ainsi, il n’hésite pas à transgresser les règles qu’il a lui-même imposé. Mais c’est un peu une stratégie à tâtonnement qui n’apporte pas de solutions réellement satisfaisantes, ni pour les patients, ni pour les industriels. Les patients, quant à eux, ne peuvent rien faire d’autre que de s’y faire même avec beaucoup de mal.
La question se pose sur le budget qu’on est prêt à investir pour sauver des vies, non seulement pour le cas du traitement de l’hépatite C, mais aussi pour un bon nombre d’autres maladies qui soulèvent le même problème.